
Une doula, pour quoi faire…et à quel prix ?
Une doula…généralement on ne sait pas qu’on en a besoin, d’ailleurs en a-t-on vraiment besoin ? On peut faire sans, j’ai fait sans, j’ai eu trois enfants et affronté un deuil périnatal sans doula, je m’en suis sortie, mes enfants semblent aller bien, je garde un excellent souvenir de mes grossesses, et un bon souvenir de mes accouchements et des séjours en maternité, avec quelques bémols pour chacune d’entre elles. Les post partums se sont passés, j’ai fait face sans trop me poser de questions, avec des difficultés surmontées tant bien que mal, personne n’en est mort…avais-je vraiment besoin d’une doula ? J’ai fait sans, comme toutes mes amies, nous nous sommes débrouillés avec mon mari, mais nous aurions aussi pu faire avec et sans doute aurions nous fait les choses autrement si nous avions eu une doula à nos côtés. Qu’est-ce que ça aurait changé ? Nous ne le saurons jamais…
Choisir une doula, est-ce donner sa chance à l’immatériel ?
A y bien réfléchir, peut-être que le coût aurait été un obstacle mais avec le recul j’ai reçu tant de cadeaux inutiles, de vêtements de marque portés une ou deux fois maximum, du matériel de puériculture que j’aurais pu me faire prêter, toutes ces dépenses auraient pu être évitées et l’argent ainsi économisé aurait pu être utilisé pour rémunérer une doula, car quel meilleur investissement que mon bien-être physique et psychique ainsi que celui de mon mari et de mes enfants ? C’est un investissement pour la vie, pas simplement un vêtement ou un objet qui ne sert que quelques mois. Mais c’est immatériel, impalpable, pas concret, je sais que je suis (j’aimerais écrire « j’étais » mais ce serait prétentieux) la première à survaloriser le matériel au détriment de l’immatériel. Et pourtant…pourtant, c’est l’immatériel qui produit des effets à très très long terme dans les plus intimes recoins de notre être, c’est l’immatériel qui nous fait croître en sagesse et en humanité, or on sait à présent à quel point les conditions de la grossesse, de la naissance, et des premiers mois de vie sont primordiaux dans le développement de l’enfant. Mais comment savoir qu’on a besoin d’une doula, alors que souvent on ne sait même pas que cela existe.
S’engager avec une doula, un pari irrationnel et risqué ?
Tant qu’on n’a pas essayé, comment savoir ? Et même si on essaye, on ne pourra jamais comparer à la version « sans doula », évidemment, donc on ne saura jamais comment ça se serait passé si on n’en avait pas eu. Mais est-ce si important ? On ne connaitra jamais le rapport qualité prix d’une doula. Une doula ce n’est pas un objet, c’est une relation, c’est faire injure à l’humanité de parler de rapport qualité prix dans ce contexte. Mais, si on s’est senti respecté.e.s, si on était à l’aise avec les choix effectués durant la grossesse, l’accouchement, le post-partum, si on a été entendu.e.s à chaque fois que cela était nécessaire, si nos besoins et ceux de notre enfant ont été reconnus et satisfaits alors c’est que tout s’est bien passé, c’est qu’on a pleinement investi ce passage de vie, et que l’enfant a été accueilli.e au sein de l’écosystème le plus favorable qui soit, c’est qu’on lui a offert le cocon sensoriel et émotionnel le plus adapté possible pour ses premiers pas dans la vie. Donc, peu importe de savoir si on aurait pu faire aussi bien sans doula, peut-être que oui c’est tout à fait possible. Mais la question ne se pose plus lorsqu’on est en paix avec la manière dont tout s’est passé. Se faire accompagner par une doula, c’est certes un pari, il y a une part d’irrationnel, un élan inexplicable auquel on s’abandonne sans avoir de filet de sécurité, comme à chaque fois qu’il s’agit d’aller vers l’humain et non vers le matériel, d’entrer en relation, surtout dans un passage aussi existentiel que celui de la transmission de la vie, c’est à chacun.e d’évaluer si ce « risque » (je n’ose parler de « chance » cela pourrait paraître biaisé) vaut la peine d’être pris pour elle, lui, l’enfant à naître, les autres enfants de la fratrie…
On est faites pour ça, non ? alors ça sert à rien ?
Qu’est ce qui aurait été différent si j’avais eu une doula? Depuis que je suis entrée en formation je me pose cette question. Si je veux devenir doula, et je le veux profondément, presque viscéralement, il faut que je sois convaincue de la pertinence d’avoir une doula à ses côtés, sinon comment convaincre ? Comment trouver des familles ? Comment « vendre ma sauce »? Justement c’est ça qui me trouble, vendre ma sauce, vendre une prestation qui devrait être disponible pour toutes les femmes gratuitement à travers leur entourage, mères, sœurs, tantes, cousines, grands-mères, amies… à travers le personnel soignant, sage-femmes, médecins, infirmières, ostéos, kinés…à travers le personnel social, assistant.e.s social.e.s, PMI, structures associatives… Oui mais voilà la doula est là parce qu’il y a des failles dans nos modes d’organisation, dans nos structures familiales et sociétales.
Manque de temps de l’entourage, éloignement géographique, appartements trop petits pour que la mère, la cousine, la sœur, l’amie puisse s’installer durablement chez la femme ayant accouché afin de la seconder pendant la période du post partum, voire, hélas, brouilles, mésententes, désaccords sur les manières d’accueillir et de s’occuper du jeune enfant. Côté personnel de santé, manque de disponibilité pour écouter, rassurer, informer plus largement que sur les pathologies et les risques de la grossesse…un suivi principalement orienté sur la détection et la prise en charge des pathologies, nécessaire, essentiel, mais quand tout « va bien » – oui c’est essentiel de s’assurer que tout va bien je le réécris pour qu’il n’y ait pas d’ambiguïté, c’est la base de la base, et les professionnels de santé sont remarquables pour s’en assurer, détecter et affronter les problèmes – mais suffit-il, ce suivi orienté « patho » pour affronter sereinement les bouleversements corporels, psychiques, financiers, logistiques que génère l’attente puis l’accueil d’un enfant? Non, bien sûr que non. Seulement, on l’ignore, on nous fait croire à nous les femmes que ça se fera tout seul, qu’on saura, grâce à notre instinct, oui vous savez bien on est faites pour ça, alors pas la peine de s’alarmer, on s’en sortira comme toutes celles qui nous ont précédées. C’est dans nos gênes il parait. Et on s’en sort, cahin-caha, avec des pets ici ou là, avec des pleurs, des douleurs, des regrets, des monceaux de culpabilité, et quand c’est dur, souvent on n’ose pas le dire, puisqu’on est faites pour ça, alors si on n’y arrive pas c’est qu’on est dysfonctionnelles, nulles, mal organisées, qu’on n’a rien compris…
Et au pire, il y a les livres, les tutos, les podcasts, les copines, internet…
Ben non c’est pas inné, et même parfois cela aurait pu l’être, car l’accès intime que nous devrions avoir aux ressentis de nos corps, ou à ceux de notre bébé peut avoir été mis à mal et même détruit par des vécus difficiles voire traumatiques (j’en fais partie…). Il arrive aussi que nos récepteurs permettant de réagir sereinement aux situations délicates rencontrées sur le chemin de la parentalité aient été endommagés ou déconnectés par des contextes familiaux dysfonctionnels…et nous devons alors improviser notre manière d’être parents sur la base de modèles défoncés, et cela peut conduire à de grandes souffrances. Et, pendant ce temps, alors que nous nous enfonçons dans des galères sans fin, la société, les média, les réseaux sociaux nous présentent des modèles de familles qui ont l’air parfaites, mais qui en vérité sont fantasmatiques, qui ne sont que des vitrines…seulement ça on ne le sait pas. Alors c’est l’angoisse, on part dans des lectures frénétiques, de blogs, de livres, dans des visionnages compulsifs de vidéos, tutos, documentaires, on s’adonne à l’écoute en boucle de podcasts, on construit des tableaux à triple entrée basés sur l’analyse de milliers d’avis utilisateurs pour acheter le meilleur matériel de puériculture, tout y passe…et on se noie. C’est génial d’avoir accès à toute cette information mais c’est un boulot à plein temps de faire le tri, de savoir de quoi on a réellement besoin physiquement, psychiquement, matériellement… Moi j’ai eu la chance d’avoir mes enfants avant le développement d’internet, donc toutes mes infos venaient du fameux « J’attends un enfant » de Laurence Pernoud et des cours de préparation à l’accouchement. Je ne savais pas grand-chose mais au moins je n’étais pas noyée. Avec le recul j’aurais voulu savoir plus, cela m’aurait évité certains écueils. Mais, paradoxalement, l’accès à une information illimitée peut être le meilleur (on trouve tout) et le pire (on se perd et on ne sait plus où on en est). La doula peut être une guide précieuse dans cette jungle informationnelle. Avec sa petite hachette elle va défricher le chemin.
La doula, un pansement sur les plaies de la société ?
Oui, la doula va pallier les défaillances de notre société, et le fait qu’elle existe pointe une forme de faillite dans nos organisations, faillite du lien et de la solidarité intergénérationnelles, faillite de l’accompagnement par la société de l’arrivée des enfants… C’est un triste constat, mais regardons le bon côté des choses, au moins il y a les doulas, elles sont là et elles comblent un peu ce trou béant dans l’accompagnement des familles. Elles adoucissent un tout petit peu l’arrivée des bébés dans ce monde, et ils en ont bien besoin ces tout-petits. Moi, future maman, je n’ai peut-être pas besoin d’une doula, mais mon enfant, peut-être en a-t-il besoin?
Et l’équité dans tout ça ? Tout le monde ne peut pas se permettre de faire appel à une doula……
Malheureusement les doulas coûtent, elles ne sont pas remboursées par la sécu (elles devraient…il est prouvé statistiquement que la présence des doulas réduit de 50% le risque de césarienne, raccourcit de 25% la durée du travail, diminue de 60% le recours à la péridurale et de 40% le recours à l’ocytocine de synthèse, et fait baisser de 30% l’utilisation des forceps…. Voir https://doulas.info/les-benefices-de-laccompagnement-a-la-naissance/), et ceci génère des inégalités entre les familles. Celles qui ont les moyens vont pouvoir plus facilement avoir recours à cet accompagnement. Cela me gêne, vraiment. Mais comment faire, les doulas doivent aussi gagner leur vie dignement, et j’avoue que les tarifs pratiqués, lorsque je les ai découverts au début de ma formation, m’ont interpellée : quoi, 60 euros pour environ 2 heures (parfois plus car l’idée n’est pas de mettre le chrono sous peine de briser la dynamique si fragile de l’échange entre la famille et la doula), sans compter le temps de déplacement, de préparation de l’entrevue, de restitution (débrief transmis aux familles, mise par écrit des ressentis et des informations recueillies lors de l’échange), de recherches si des questions ont été soulevées, éventuellement d’accompagnement WhatsApp ou téléphone, bref, cela me paraissait vraiment pas cher payé. Certaines doulas, et je comprends au regard de l’investissement que cela représente, facturent 90 euros pour les deux heures, mais là je ne me sens pas légitime à demander une telle somme, sans doute parce que je ne l’aurais pas payée moi-même – payer 90 euros « juste » pour parler à quelqu’un dont la formation repose avant tout sur la pratique de l’écoute active (un vrai trésor mais qu’on ne valorise pas si on ne connait pas), je suis à peu près sûre que je ne l’aurais pas fait, sauf si on m’en avait fait le cadeau (à la place des vêtements taille 6 mois de grandes marques). Mais encore une fois, au regard des bénéfices et de l’investissement personnel et humain que cela représente, c’est un tarif justifié. C’est juste que je ne l’assume pas.
Le choix d’être doula, laisser le passage libre pour ma part d’irrationnel
Mais le tarif de 60 euros (l’autre extrémité de la fourchette) me dérange aussi, je suis peut-être déformée par mon ancienne vie professionnelle dans laquelle je travaillais beaucoup sous une pression importante, mais en échange d’une très bonne rémunération. Je jouissais aussi d’une expertise validée par des diplômes reconnus et j’avais des responsabilités importantes non transférables à une personne non formée et non expérimentée. On peut être doula sans certification professionnelle (et cela ne me pose pas de problème en ce qui me concerne), le plus important est d’écouter sans jugement, pleinement, de tout son cœur, bref quasiment l’opposé de ce que je faisais, où il fallait être bardé de diplômes et avoir beaucoup d’expérience pour faire des comptes en se blindant et en écoutant le moins possible les autres, pour éviter de perdre du temps (bien sûr je caricature un peu j’ai développé des relations très riches dans cette ancienne vie). Du jour au lendemain n’importe qui peut s’improviser doula. Pas responsable des normes comptables internationales. Aurais-je commis une folie en laissant échapper ce job de super experte des normes comptables et des instruments financiers pour me tourner vers un job où l’important c’est d’écouter et d’être là ? Un truc que tout le monde peut faire en fait.
Glisser d’un schéma d’exploitation à un autre ? On n’en sort jamais, alors ?
Oui, selon les normes de réussite de notre société, c’est une folie. Et cette angoisse au sujet du rapport rémunération / investissement en temps et en humanité (car, avant, ayant face à moi des tableaux excel la plupart du temps, mon humanité n’était pas trop mise à contribution, donc pas vraiment de danger de déstabilisation de ce côté-là) révèle sans doute le fait que je suis encore imbibée des schémas sociétaux imprimés en moi depuis toujours – ces multitudes d’injonctions bien connues : « travaille bien à l’école, aie de bonnes notes, fais de bonnes études, trouve un bon travail « intellectuel » bien rémunéré et que tu peux exhiber fièrement lorsqu’on te demande ce que tu fais, fonde une famille, achète un appartement, pars en vacances, et fais en sorte que tes enfants travaillent bien à l’école »…et la boucle est bouclée. Dur de se débarrasser de ces oripeaux, on nous les a enfoncés bien profondément dans la chair, comme au fer rouge. Alors j’ai flippé, j’ai eu peur de remettre le doigt dans un engrenage où je ne pourrais plus disposer de mon temps comme avant, tout en étant bien moins rémunérée qu’avant. En gros, où je me ferais spolier encore plus qu’avant. J’ai eu peur d’être face à des personnes qui « abusent » de moi, car j’ai été abusée dans mon ancienne vie, je n’entrerai pas dans les détails mais j’en ai eu la confirmation par des personnes objectives. A peine me suis-je extraite d’un schéma d’exploitation que je remettrais le pied dans un autre encore pire ?
Bienvenue dans le monde des métiers essentiels…mais dédaignés
Ça a tourné longtemps en moi cette question, et en fait elle tourne dans la tête de toutes les personnes – des femmes très majoritairement- qui se dirigent vers ces métiers par choix et non par nécessité. Au passage, quelle chance nous avons de pouvoir nous poser ces questions. Tant de personnes acceptent des emplois sous le coup de la seule nécessité et n’ont pas le luxe de se poser ces questions. Je leur rends ici un grand hommage et, face à ces personnes, j’ai un peu honte de mettre noir sur blanc mon débat intérieur qui témoigne de ma position privilégiée dans la société. Pour en avoir discuté avec certaines de mes co-stagiaires à l’Institut de Formation des Doulas de France je ne suis pas la seule à me poser ces questions. C’est le problème terrible de la rémunération du service à la personne en France, et plus largement des métiers du soin, dévalorisés malgré leur caractère essentiel. Sans toutes ces personnes qui prennent soin de nos enfants, nos aînés, nos malades, des personnes vulnérables, de la propreté des espaces où nous vivons etc. etc. …nous ne serions pas humains. Mais revenons aux doulas.
Vivre de mon travail sans renoncer à mon authenticité
Une doula peut difficilement être doula à plein temps, surtout si elle a charge de famille, un loyer à payer, des frais de déplacement…. donc les doulas, pour vivre dignement, pour que leurs familles ne subissent pas le poids économique de leur choix de vie qui est un choix de cœur, développent les services annexes, rebozo, ateliers portage, massages, bains sensoriels, chant, yoga prénatal…toutes activités permettant de générer des revenus complémentaires. En synthèse, l’activité d’accompagnement est « subventionnée » par les services annexes, alors que c’est pour l’accompagnement qu’elles ont vibré en premier lieu. Mais les services annexes, ce n’est pas trop mon truc. Donc, j’en reviens toujours au même point, quelle rémunération demander pour les accompagnements en étant convaincue que la relation est équitable ? Comment être doula en me sentant rétribuée en proportion avec le temps, l’énergie, l’humanité investies, sans aller vers l’offre de services annexes qui ne correspondent pas à qui je suis (mais qui ont tout leur intérêt – c’est juste que je ne le « sens » pas pour le moment) ? Je ne me sentirais pas pleinement authentique dans un accompagnement si je venais à conseiller un soin ou un produit que je vends par ailleurs. J’aurais peur de tomber dans le conflit d’intérêt (c’est très personnel, j’attire votre attention sur le fait qu’il n’y a là aucun jugement de ma part vis-à-vis des doulas qui le font, et j’en connais, elles sont très compétentes pour être doula et monitrice de portage, doula et spécialiste du rebozo etc. et il y a pour la femme accompagnée un réel avantage à disposer d’une doula compétente et formée dans d’autres domaines et auprès de laquelle elle peut bénéficier de services complémentaires, cela viendra en outre enrichir naturellement et sans aucun coût complémentaire sa pratique de doula).
Mais moi, ce qui me convient, ce dont j’ai envie aujourd’hui à l’orée de cette nouvelle vie, c’est de m’extraire le plus possible des mécanismes mercantiles de notre société (actionnés à toute petite échelle et de manière totalement justifiée dans le monde des doulas mais actionnés de manière extravagante à une échelle planétaire dans mon ancien monde, conduisant à des inégalités intolérables et au pillage méthodique de notre planète). Je ne veux pas avoir la moindre once d’intérêt à vendre plus que nécessaire et, si je pouvais être simplement doula bénévole, je le serais sans doute. D’ailleurs il est tout à fait possible que je le fasse ultérieurement, en parallèle des accompagnements rémunérés.
Dépasser la peur du « all-inclusive », et oser la confiance
Je suis restée quelques mois avec cette équation qui me semblait insoluble : être doula et recevoir la juste rémunération de mon investissement. Et enfin j’ai eu la réponse, elle m’est venue lorsque je ne m’y attendais pas – c’est souvent quand on a cessé de réfléchir à un problème qu’il se résout spontanément – dans la voiture qui nous ramenait à la gare à l’issue de l’un des week-ends de formation doula. J’étais à l’arrière avec l’une des formatrices, doula depuis 25 ans, œuvrant sans relâche en faveur de la reconnaissance des doulas en France. J’ai une immense admiration pour elle et toute l’équipe de formatrices et une immense gratitude pour l’extrême générosité dont elles font preuve dans la transmission de leur savoir. La discussion tournait justement autour du tarif des doulas. A l’avant il y avait deux de mes co-stagiaires, également préoccupées par le sujet – nous le sommes toutes. Et notre formatrice a dit très simplement, « moi, je facture un forfait de … euros pour un accompagnement ». Je lui demande illico : « et ça correspond à combien de rendez-vous ? » Elle me répond qu’il n’y a pas de nombre prédéfini, que c’est la famille qui gère selon ses besoins. Je suis un peu interloquée, car immédiatement (réflexe de l’ancien monde dans lequel la pratique du « all-inclusive » conduit les bénéficiaires du système à surcharger leurs assiettes au buffet à volonté et à en envoyer la moitié à la poubelle) je me dis, « mais je vais me faire bouffer si je fais ça ». Je demande lui donc : « et les familles n’abusent pas ? », dévoilant ainsi l’image déplorable que j’ai de mes congénères, qui plus est des familles que je me propose d’accompagner. Mais il fallait que je pose cette question. Elle ne semble pas surprise par cette réaction, et me répond très simplement « non, ça m’est arrivé une fois en 25 ans », et encore, lorsqu’elle a abordé le sujet avec la personne, celle-ci a reconnu le dérapage, et elle a pu ajuster le tarif en conséquence.
Et oui, parce que dans le monde des doulas existe la confiance, alors qu’elle a été détruite, dévoyée, abusée dans l’autre monde, celui des experts en normes comptables internationales. Quand on est dans une relation de confiance et de respect mutuels on peut se permettre ce genre de choses, et même on le doit, car sinon, si chaque rendez-vous est minuté, si le nombre de rendez-vous est prédéfini, on enferme la relation dans cette logique mercantile que je cherche à éviter et on retombe sans cesse dans le panneau.
Laisser la chance à l’instant
Alors j’ai décidé de proposer un forfait « accompagnement » sans nombre de rendez-vous prédéfini, et sans durée prédéfinie pour chaque rendez-vous. Car j’ai compris qu’un rendez-vous de 3 heures peut être de piètre qualité si le mental est ailleurs, si on a mal dormi, si on est dérangé par une intrusion extérieure, alors qu’un rendez-vous d’une demi-heure peut être extraordinaire. On ne peut pas savoir à l’avance, donc il faut laisser sa chance à l’instant, et pour cela quoi de mieux que de ne pas s’enfermer dans le chiffre ? Moi qui travaillais en comptabilité cela me va très bien de m’affranchir encore davantage que je ne le pensais du chiffre. Juste un montant, le prix du forfait et ensuite on se fait confiance on ne compte plus, seul l’humain compte. Mais, moi, j’ai la chance de pouvoir subventionner mon activité de doula grâce aux revenus perçus dans ma vie antérieure, ce qui est rarement le cas pour les doulas.
Longue vie aux doulas.
Chère Cécile,
L’authenticité n’est pas un mot valise pour toi, elle transpire dans tes mots. Si ton blog a la chance de voyager, je suis très optimiste à l’idée qu’il raisonne pour beaucoup de femmes enceintes… ça donne envie de t’avoir à ses côtés 💛
Merci mille fois Lise pour tes mots si encourageants, j’espère être à la hauteur de ces espoirs.